La grippe aviaire se propage rapidement parmi les oiseaux, mais il est encore extrêmement difficile pour les humains de l’attraper. Selon Sherry Cooper, économiste en chef, BMO Nesbitt Burns, beaucoup d’informations erronées circulent, occasionnant de la peur et des coûts économiques inutiles. L’infection humaine exige généralement que la personne ait été en contact direct avec des oiseaux malades ou morts. Cela est surtout susceptible de se produire là où se pratique l’aviculture artisanale et où les volailles vivent en contact étroit avec des humains — généralement dans certaines parties de l’Asie, de l’Afrique et du Moyen-Orient. Une pandémie humaine causée par le virus H5N1, si elle devait se produire, commencerait sans doute dans les pays émergents plutôt qu’en Europe ou en Amérique du Nord.
Dans son étude intitulée The Avian Flu Crisis: An Economic Update, Sherry Cooper explique que, contrairement à d’autres catastrophes naturelles ou aux activités terroristes, les pandémies sont envahissantes et durent longtemps, de sorte que les pertes économiques nettes sont importantes et prolongées. Selon elle, une pandémie de grippe aviaire aurait des répercussions considérables sur la situation de l’offre et de la demande. L’absentéisme généralisé et la désorganisation du commerce domineraient les activités du côté de l’offre, tandis que la prise de distance sociale et la peur augmenteraient dans un premier temps la demande de biens essentiels, comme les aliments non périssables, l’eau, les fournitures médicales et les soins de santé, mais réduirait la demande pour pratiquement tout le reste.
Les systèmes mondiaux de soins de santé fonctionneraient au-delà de leur capacité d’intervention urgente. Le matériel médical essentiel, les fournitures médicales et le personnel qualifié seraient sans doute insuffisants. Il pourrait y avoir des coupures de courant et des interruptions de services publics prolongées ainsi que des perturbations des services gouvernementaux. La clé, pour faire face à des effets aussi débilitants, réside dans la préparation, déclare Mme Cooper.
« Le gouvernement, les entreprises, les personnes et les organismes de santé publique doivent élaborer des plans en vue d’assurer la continuité de leurs activités et de se préparer. Ils doivent perfectionner ces plans, les vérifier, les vérifier de nouveau et les modifier au fur et à mesure que la situation évolue », recommande vivement Mme Cooper.
Elle explique que l’interdépendance des économies dans le monde et l’importance de la Chine dans les domaines des produits de base et de l’exportation de produits peu coûteux, de même que l’extraordinaire volume du commerce international et des voyages internationaux, augmentent la possibilité de perturbations économiques en cas de pandémie humaine. Les chaînes d’approvisionnement sont maintenant mondiales et les stocks sont gérés selon la méthode juste à temps. Mme Cooper émet l’hypothèse que l’important ralentissement économique qu’une pandémie occasionnerait en Asie réduirait sensiblement la demande de produits de base et de matériaux industriels et entraînerait les prix à la baisse. Ce qui aurait des répercussions particulièrement négatives dans les pays producteurs de produits de base comme le Canada.
Les gens ne peuvent attraper le virus H5N1 en mangeant du poulet ou des produits de la volaille bien cuits. Néanmoins, selon Sherry Cooper, l’industrie avicole est déjà durement frappée, surtout en Europe. Les répercussions se feront sentir dans plusieurs industries, dont celles de la production d’aliments pour volailles et de la transformation de la viande de volaille, ainsi que dans les épiceries et les restaurants, spécialement ceux qui se spécialisent dans la vente de poulets. L’industrie de la volaille des États-Unis, qui vaut 30 milliards de dollars américains, est déjà touchée, car ses exportations ont chuté de 28 % en décembre et on s’inquiète de la possibilité d’une baisse prochaine encore plus importante.
Outre l’industrie de la volaille et ses industries complémentaires, les secteurs immédiatement touchés seraient le tourisme, les voyages et les transports, le tourisme réceptif, les transports publics, l’assurance santé et l’assurance vie, le théâtre, les casinos, les établissements sportifs, les sports-spectacles, les installations religieuses, les centres de congrès, les restaurants et les détaillants de biens non essentiels, de même que les fournisseurs de services non essentiels et les personnes qui seraient susceptibles de transmettre directement la maladie, comme les dentistes et les coiffeurs.
Selon le modèle économique de Mme Cooper, une pandémie bénigne réduirait la croissance du PIB mondial annuel de deux points de pourcentage comparativement à ce qu’elle aurait été normalement. Une pandémie grave, semblable à celle de la grippe espagnole de 1918, réduirait la croissance du PIB mondial de six points de pourcentage (là aussi par rapport au taux de croissance normal). Elle considère ces résultats comme des estimations mondiales prudentes, car le modèle économique utilisé repose sur l’hypothèse que tous les pays seraient touchés également. Mais le nombre des pays atteints plus sévèrement que les États-Unis serait très probablement plus élevé que celui des pays qui s’en tireraient mieux — mais même cela n’est pas une certitude.
S’il se produisait des cas de « choc septique » ou de sécrétion massive de cytokines (comme lors de la grippe virale de 1918), où le système immunitaire attaque non seulement le virus mais aussi les organes et tissus internes, les taux de mortalité seraient les plus élevés parmi les femmes enceintes et les personnes âgées de 15 à 40 ans. Mme Cooper fait remarquer que selon de nombreux experts, les systèmes de santé modernes ne peuvent pas faire face aux cas graves de choc septique de façon beaucoup plus efficace qu’en 1918, même dans des unités de soins intensifs dotées de tout le matériel et de tout le personnel modernes. « Le groupe frappé le plus durement serait celui des jeunes, c’est-à-dire les membres les plus productifs de la population, qui représentent aussi le plus grand potentiel reproductif », ajoute Mme Cooper.
Ce phénomène aurait des répercussions durables, en réduisant les taux de natalité et en accélérant le vieillissement d’une population déjà âgée, ce qui aggraverait la contre-performance économique pendant des années, et en augmentant la demande qui pèse déjà trop lourdement sur les régimes de retraite et les systèmes de soins de santé. Personne ne peut prévoir avec exactitude quelles seraient les caractéristiques de la forme mutante de virus qui causerait la pandémie ni comment ces caractéristiques évolueraient à la longue.
« Il est important de savoir, cependant, que même dans le cas d’une pandémie grave, environ 99 % de la population mondiale survivrait et que les gens recommenceraient à voyager et à commercer à mesure que la situation économique se rétablirait », conclut Sherry Cooper.
On peut consulter le texte intégral de l’étude à cette adresse :
http://www.bmonesbittburns.com/economics/reports/20060313/report.pdf
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